
https://pixabay.com/photos/wedding-marriage-husband-wife-2595862/
Traduit par Rabbi Émile Ackermann
Publié le 22 octobre 2021
Selon un adage populaire, dans un mariage, les mots les plus importants pour un mari ne sont pas “Je t’aime”, mais “Oui, ma chérie”.
Qu’il s’agisse d’un mari ou d’une femme, il y a deux types de “oui, ma chérie”. Il y a un “oui, ma chérie” de surface et un “oui, ma chérie” plus profond. La différence entre les deux réponses apparaît lorsque nous comparons deux versets, l’un de la parasha de cette semaine et l’autre de la parasha de la semaine dernière.
Dans la parasha de cette semaine, Vayeira, Sarah agit pour protéger Yitzchak de Yishmael et demande à Avraham de chasser Agar et Yishmael. Dieu dit à Avraham : “Tout ce que te dira Sarah, écoute sa voix – Shema bi-kolah – car c’est par Yitzchak que ta descendance sera comptée” (Gen. 21:12). Dieu dit à Avraham : La nation d’Israël descendra de Yitzchak, et c’est par lui que s’accomplira la promesse que je t’ai faite. Son identification en tant qu’héritier est primordiale. Écoute la voix de Sarah.
La saga de Hagar et Yishamel commence déjà dans la parasha de la semaine dernière, Lech Lecha. Sarah, alors nommée Saraï, dit à Avraham – alors Avram – qu’elle est stérile et qu’il devrait prendre sa servante et avoir des enfants avec elle. Quelle est la réponse d’Avraham ? Il fait ce qu’elle lui dit : “Avram écouta la voix de Saraï -li-kol Saraï” (Gen. 16:2).
Ces deux versets décrivant l’acte crucial d’écouter la voix de Sarah diffèrent par une lettre clé. Dans le verset ci-dessus, Avraham écoute li-kol Saraï, la voix de Saraï, avec un lamed précédant le mot kol, la voix. Cela contraste avec le commandement de Dieu à Avraham dans la parasha de cette semaine, où il est dit à Avraham d’écouter bi-kol Sarah- à, ou dans, la voix de Sarah- avec un bet comme première lettre, et non un lamed.
Quelle est la différence entre li-kol et bi-kol ?
Alors qu’en général, dans le Tanakh, il n’y a pas de différence significative entre les deux, dans ce cas-ci, je pense qu’il y en a une profonde.
Écouter la voix – “li-kol” – signifie obéir. Avraham a obéi à ce que Sarah lui a dit. Il s’agit d’un “oui, ma chérie” de surface. C’est le “oui, ma chérie” de la blague.
Écouter bi-kol est différent. Le mot “bet” signifie “entrer dans quelque chose”. Il s’agit d’écouter non pas la voix de la personne, mais dans ou sous la voix de la personne. Il s’agit d’écouter attentivement et de comprendre ce que la personne dit réellement à un niveau plus profond.
Sarah demande à Avraham d’avoir des relations sexuelles avec Agar, qui portera un enfant par son intermédiaire. Et la réponse d’Avraham ? Il suit et obéit. “Prendre ta servante ? Oui, ma chérie. Merveilleuse idée !”
Mais est-ce là la réponse que Sarah souhaitait ? Une telle réponse consiste à écouter la signification superficielle de sa voix. C’est suivre ses directives et rien de plus.
À ce moment-là, Sarah voulait-elle qu’il obéisse ou voulait-elle qu’Abraham fasse preuve d’empathie, qu’il l’écoute activement, qu’il entende sa douleur ? Cela aurait fait toute la différence si Abraham avait commencé non pas par obéir à sa voix, mais par écouter bi-kolah, l’angoisse qui se cachait sous ses mots : “Sarah, je ne peux même pas imaginer ce que tu dois ressentir en ce moment. Je sais à quel point tu veux avoir des enfants et les avoir avec moi. Comment pourrais-je jamais être intime avec quelqu’un d’autre ?”. Quelle que soit leur décision finale, Sarah sait qu’elle est aimée et qu’Abraham a ressenti sa douleur.
Plus tard, Avraham bannit Agar et Yishmael. C’est un acte qui peut être considéré comme moralement délicat et qui aura des conséquences néfastes. Ici encore, il a écouté li-kol Sarah – la signification superficielle de ses paroles. Mais Dieu lui avait dit d’écouter bi-kol, leur sens profond. Comme l’explique le verset : “Tout ce que Sarah te dit, écoute-la bi-kolah”. Pourquoi ? “Car c’est en Yitzchak que sera comptée ta descendance. Ecoute, Dieu dit à Avraham, avant tout, ce que Sarah dit à un niveau plus profond. Elle essaie de protéger Yitzchak et l’avenir du peuple juif. C’est cette préoccupation que vous devez prendre en compte. La façon dont vous agissez pour y parvenir est une autre question.
À ce moment-là, peut-être qu’Avraham n’aurait pas dû écouter li-kolah, qu’il n’aurait pas dû obéir à sa demande spécifique. Mais d’une manière ou d’une autre, il devait écouter bi-kolah.
Dans le mariage, nous avons tendance à fonctionner au niveau li-kol. L’un des conjoints peut dire : “Tu ne sors jamais les poubelles, tu ne fais jamais la vaisselle !” En réponse, l’autre conjoint risque de se mettre sur la défensive et de répliquer à ce qui est dit en surface : “Qu’est-ce que tu racontes ? Je l’ai fait hier encore ! Tu as tort !” Et la situation se détériore à partir de là.
Ce qu’il faut à ce moment-là, c’est se concentrer sur ce qui est vraiment dit. Nous devons nous engager dans une écoute bi-kol, parce que ce qui est vraiment dit sous les mots est quelque chose de complètement différent. Ce pourrait être : “J’ai l’impression qu’on me prend pour acquise, je ne me sens pas prise en compte. Mes préoccupations ne semblent pas avoir d’importance. Je me sens seule. J’ai besoin d’un câlin”.
Si, à ce moment-là, l’autre conjoint était capable de changer d’approche et de “plonger” dans la voix au lieu de rester à sa surface, cet échange ne donnerait probablement pas lieu à des combats, à de la colère et à un retranchement rigide de chacun qui reste sur sa position, mais plutôt à des discussions et à des échanges de points de vue, ce qui permettrait à l’autre conjoint de se sentir plus à l’aise.
Ce serait un “Oui, ma chérie” avec un réel impact.